La collection permanente : Exhibition #2

Thursday, February 23, 2012

Si en ce moment je me lèche le doigt, ce n’est pas pour mieux tourner les pages à l’aide d’une technique colporteuse de microbes, mais parce qu’un feuillet pernicieux en a incisé la peau, ouvrant le cuir trop fin de mes mains. Un comble pour quelqu’un qui voulait se plonger dans le Leather Issue d’Exhibition.

Il y a un an, Edwin Sberro, Gaël Hugo et Boris Ovini nous avaient laissé avec les Lipsticks. Je revois la couverture, mais du rouge, aujourd’hui, je l’associe aux ongles vernis. J’en visualise un, plutôt long, courant le long d’une échine frémissante, dans un sens puis dans l’autre, comme on dessine sur du nubuck. Puis le jeu lasse, et l’on passe à d’autres cuirs. Grainé, glacé, pleine fleur ou vernis, chiné en friperie, percé comme un lobe, ou délicieusement fétichiste. Je pense aussi à la rétrospective d’Alexander McQueen au MET, à un cuir éternel retour aux sources, cuirasse idéale pour nous, mammifères sadiques que l’évolution a laissé roses et nus.

Ce cuir un peu écœurant à l’arrière des berlines, grinçant quand il est de mauvaise qualité, conteur d’histoires sur une paire de boots couturées… Plus tard dans la nuit, il enserre des muscles bandés, souligne des seins aux tétons dressés, mais au commencement il y a la matière. Il y a également l’artisan. Ceux d’Hermès ont confié leurs outils à l’objectif de Guido Mocafico.

Malgré la présence d’un texte sur Serge Lutens ou un entretien avec Olivier Saillard, Exhibition est avant tout un magazine pour l’image.

Cette révérence faites à l’image appelle un objet de grande taille et une impression irréprochable : un travail précis, qui commande le rythme de parution, annuel, et qui tranche avec la frénésie de la toile. Ces objets nous offrent du temps, le temps qu’il faut pour en jouir : aller les chercher, les transporter, les laisser reposer. Ensuite, un peu plus tard, il s’agit de trouver l’espace pour laisser se déployer ces deux grande ailes de 44 cm sur 33.

La pièce est extraite de son coffret, on la positionne, on l’ouvre et on y saute à pieds joints. On y croise Willy Vanderperre, Roxane Mesquida, Solve Sunsbo, Boris Ovini, entre autres. Les pages coulent, comme la substance noire de la série de Suzie Q et Léo Siboni, on traverse le tout et on se dit, sourire en coin, qu’internet est une des plus belles choses qui soit arrivée aux magazines.

La Conjuration

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(Exhibition est disponible chez Colette, en édition limitée)

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Zeitgeist Paris

Thursday, January 5, 2012

« Qui accepterait de risquer sa vie pour du café bio, des meubles recyclés et des panneaux solaires ? Les causes de notre temps nous paraissent aussi médiocres que notre existence : qualité de l’air, commerce équitable et biodiversité. Il n’y a pas là de quoi soulever les foules, si ce n’est pour leur promettre une vie tranquille, un air sain et des pelouses propres. »

Cet extrait d’Après La Défaite de Bruce Bégout est tiré de Zeitgeist, la prise de risque de Yan Céh. Rassurez-vous, il n’y est question d’aucun Saint Georges pourfendant un dragon d’hydrocarbure mais bien d’une croisade esthétique, habitée par la foi en l’écrit.
Un magazine se feuillette, se parcourt, s’oublie. Zeitgeist n’en est pas un, c’est une revue, conçue pour s’y plonger. On y découvre le manuscrit des Mots Bleus que Jean-Michel Jarre griffonna pour Christophe. D’abord des mots de guingois, à l’encre bleue, raturés, dansants désordonnés. L’encre a bavé, s’est imprimée à l’envers sur la page limitrophe. Les strophes arrivent. Puis l’une prend de l’ampleur, évidente : les mots qu’on dit avec les yeux, toutes les excuses que l’on donne, vous connaissez la chanson…
Si Zeitgeist propose une réflexion sur le langage, le mot n’y est pas exclusif ; d’ailleurs, Michel Houellebecq n’y est pas publié en tant qu’écrivain, mais comme dessinateur : son autoportrait est même analysé par Diana Widmaier Picasso. Dans une remarquable critique, elle fournit une clé, donnée par son illustre grand-père à Brassaï : « Pourquoi croyez-vous que je date tout ce que je fais ? C’est qu’il ne suffit pas de connaître les œuvres d’un artiste. Il faut savoir quand il les faisait, pourquoi, comment, dans quelles circonstances. »

Entre « faiseurs de revues » on se rencontre, et l’on troque ses bébés. J’ai remis Passion à Yan et il a eu la gentillesse de m’offrir Zeitgeist. Lorsque nous discutions, il fut interrompu par un coup de fil de Jean-Jacques Schuhl, l’écrivain culte qui lui a conseillé de se lancer dans cette aventure. Je le questionnai et il me le décrivit comme le véritable zeitgeist – l’esprit du temps. Un esprit dans tous les sens du terme, hantant le présent mais venant du passé, ou de l’avenir.

Pour clore ce post – vilain mot contemporain – je citerai le plus ancien collaborateur de Zeitgeist, un certain Charles Baudelaire dont voici un extrait de Fusées, datant de 1887 :

« Perdu dans ce vilain monde, coudoyé par les foules, je suis comme un homme lassé dont l’œil ne voit en arrière, dans les années profondes, que désabusement et amertume, et devant lui qu’un orage où rien de neuf n’est contenu, ni enseignement, ni douleur. Le soir où cet homme a volé à la destinée quelques heures de plaisir, bercé dans sa digestion, oublieux – autant que possible – du passé, content du présent et résigné à l’avenir, enivré de son sang-froid et de son dandysme, fier de n’être pas aussi bas que ceux qui passent, il se dit, en contemplant la fumée de son cigare : que m’importe où vont ces consciences ? Je crois que j’ai dérivé dans ce que les gens du métier appellent un hors d’œuvre. Cependant je laisserai ces pages, –  parce que je veux dater ma colère. »

Par Foucauld

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Meks

Wednesday, August 3, 2011

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Des rêves ont germé dans des esprits plus ou moins fous ; certains ont été produits, à l’unité ou à la chaîne. Puis d’autres sont arrivés. Arrêter de produire n’induit pas toujours un arrêt de mort. C’est parfois ainsi que l’on mesure la véritable qualité d’une création : résistera t-elle au temps, aux modes et aux techniques ? En terrasse au croisement des rues Saint Honoré, de l’Arbre Sec et Sauval, je fume un Royal Selection n°11 de Punch dont la production a été abandonnée. Il s’agissait de mon cigare favori. L’est-il toujours après avoir été préservé des mois dans mon humidor ? Je connais un vieil homme que ses ennuis de santé ont condamné à quitter ses grosses berlines au profit de modèles plus raisonnables. En parle-t-il pour autant ? Non, s’il parle d’automobiles, c’est des Hotchkiss et des Onze Légères de sa jeunesse, pas des paquebots allemands qu’il conduisait il n’y a pas si longtemps…

Par Foucauld

(Photos : MEKS)

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Marteen Baas fout le feu

Friday, May 15, 2009

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La pyromanie est un art, une forme d'expression qui devrait faire l'objet d'un enseignement dans tout établissement d'arts appliqués qui se respecte. C'est en tout cas ce qui me vient en tête lorsque je regarde cette série de chaises réalisée par Marteen Baas, allemand de naissance et hollandais de cœur. La recette est assez simple : prenez un meuble vénéré par la communauté des faiseurs de meubles et un bidon d'essence. Marriez les et jetez une allumettes pendant la nuit de noce. Laissez les atomes se rapprocher, mais juste ce qu'il faut (comme dans toute bonne recette, ce temps de cuisson est laissé à l'appréciation du maître d'œuvre). Une fois le coït achevé, recouvrez le tout de résine Epoxy et filez vendre votre bébé chez Moss. S'il vous reste un peu d'essence et un vieux Steinway, vous pouvez aussi le faire cramer.

Par Arnaud

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Coco de Mer

Thursday, March 26, 2009

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Comme tout le monde, nous avons des projets. L'un d'entre eux : le lancement d'un magazine érotique. On vous tiendra au courant. Quoi qu'il en soit, certaines âmes bienveillantes nous refilent leurs filons, pour l'inspiration. Coco de Mer est de ceux-là. Oubliez Fifi, balancez Chantal aux orties, là on travaille le cuir sans trop se préoccuper de la dentelle. Plus qu'une simple boutique, Coco de Mer est un manifeste pour la libération des petites culottes, pour l'adoption massive du bondage comme exercice émancipateur. La clique ne s'arrête pas au corset de soir rehaussé de harnais en cuir. Elle nous offre des conférences sur le cunnilingus (60£), des plumeaux, des sets de tables, diverses potions magiques, un magnifique livre de coloriage, des godemichés de genoux, des épées de cuirs, le tout présenté dans un style boudoir plutôt réussi. La fête des mères approche, n'oubliez pas.

Par Arnaud

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(la plus belle pièce pour la fin)
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L’Amour et la Grèce

Thursday, February 26, 2009

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Avant, je me représentais la Grèce comme un petit îlot au passé trouble, où les garçons se promenaient en maillots de bains et s'aimaient tendrement au creux des calanques. Récemment, j'ai appris que ces même garçons avaient des copines et qu'ensemble ils étaient imbattables au lancer d'armes incendiaires par nuit de pleine lune. Hier, je me suis aperçu qu'ils savaient, aussi, fabriquer des objets pour rendre ton quotidien plus beau. Greece is for lover impose son dogme: être un demi-dieu ou ne pas être. Il convient donc d'être bronzé, musclé, insensible, de tomber amoureux toutes les nuits et de tâter la planche à roulette avec adresse. Une fois les bases posées, l'équipe déroule: haltères en formes de colonnes antiques, skate en cuir monté de sandalettes de même facture (arrive seul à la plage avec cette machine, tu repars marié, pour sûr), hameçon à olive pour Martini irrésistible (le jeu de mot Hook / Hookers fonctionne mieux en anglais), rideaux pour assimiler les danses helléniques, bougies pour oublier et se faire oublier, cendriers qui réunissent deux amours primordiaux: la cigarette et les plantes vertes. 
La clique cultive un style personnel et cohérent pour nous livrer une floppée d'objets bien pensés, qui ne révolutionnent rien (sauf le skate en cuir, ça c'est un concours Lépine dans la semaine) mais que tu veux quand même voir dans ton salon.

Par Arnaud

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Bike Exif : “j’suis du genre à mourir par balle, à crever en moto…”

Tuesday, February 10, 2009

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Sujet tabou dans nos familles et prétexte à énervement, ni Arnaud ni moi n'avons notre permis de quoi que ce soit. Cela ne nous empêche pas d'apprécier ce qui est beau, même quand le beau touche à la mécanique. C'est le cas avec les bécanes présentées sur Bike Exif, un blog très chouette qui poste ce qui ce fait de plus audacieux en matière de moto. D'hier ou d'aujourd'hui, improbables ou bêtes de courses, elles nous donneraient presque envie de sacrifier 1500 euros chez les escrocs du permis de conduire…

Par Foucauld

(via Cool Hunter)

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Peluches

Sunday, January 11, 2009

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L'anniversaire de la petite Lulu arrive à grands pas, et vous ne savez toujours pas avec quoi la rendre heureuse. Elle a sept ans, oubliez le Fixie (décidément). Dora l'Exploratrice? Un peu mou, ses copines lui rappelleront son manque de discernement pendant des mois et elle vous en voudra pendant des années. Pourquoi ne pas cultiver ses penchants pour le sang et les malformations congénitales, tout en terrifiant les mamans à la sortie de l'école? Imaginez la petite, à la récrée, sortant de son cartable sa nouvelle peluche:  l'alligator dévorant le nouveau né. Si elle est sage elle aura aussi droit au lapin crucifié par la carotte géante et aux oursons siamois. Heureuse Lulu avec ses peluches tricotés. 

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Par Arnaud

(via Slightly warped)

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Nagi Noda

Friday, October 31, 2008

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Nagi Noda est décédée en septembre. Je ne le savais pas; mon maillage ne doit pas être assez dense. Ca m’attriste un peu. J’étais tombé sur elle avec le clip de Tiga, Far from home. Cette fille, c’était un peu la petite sœur japonaise de Gondry (regardez la vidéo du quebecois, repensez à Around the world et vous verrez, d’ailleurs les deux sont logés chez Partizan).
Je ne suis jamais emballé par les vinyl toys, sauf lorsqu’elle les démembre, le chiot fleuri de Jeff Koons parait fade à côté de son monstre à elle, ses montages photographiques sont racés au possible, et j’aimerais que toutes les filles du quartier portent ses perruques. Je ne sais pas quoi rajouter, "touche à tout de génie", trop consacré pour lui aller, disons simplement qu’elle avait son truc.


Tiga – Far From Home
envoyé par LastGangRecords

Naginoda
 

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Par Arnaud

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Poil au menton

Thursday, October 30, 2008

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(crédit: Terry Richardson)

"Je fais ce que je veux et je réinvente mes fantasmes de gamins pour me faire des tunes". C’est à peu près ce qu’on dû se dire les mecs de Chinnychinchin. Sinon comment en arriver à produire de petits soldats en plastique à échelle humaine ?
Vous vous souvenez quand vous brûliez vos jouets pour "faire des décors" ? Eux en ont fait un business model et vendent des carcasses calcinées comme d’autres refourguaient des Dinky Toys.
Enfin, si vous cherchiez à afficher votre support aux refuges pour animaux gays, ou que, depuis tout petit, vous militez pour la libération d’ Hansel et Gretel, ils vous offrent l’occasion de la faire savoir. On dit merci.

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Par Arnaud

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