Stay Gold !

Monday, August 30, 2010

Emerica-stay-gold-video-cover

La première fois que j’ai emmené un non-initié à une projection de vidéo de skateboard, mon camarade Tigre de Papier me dit que cela lui procurait un effet similaire à celui que je connaîtrais face à un florilège des buts de Ligue 1 : un bâillement prolongé. Si vous vous moquez du skateboard, l’article suivant vous ennuiera. Vous voilà prévenu.
Jeudi soir avait lieu l’avant-première de la Stay Gold. Ce nom, digne d’être tatoué sur des phalanges, est celui de la nouvelle vidéo Emerica, la première depuis sept ans. Malgré ma chance de posséder l’un des rares sésames, j’ai une demi-heure de retard lorsque je franchis les portes de l’Escurial. Mon bienfaiteur Samir Krim m’ouvre, puis referme. Derrière-lui, Heath Kirchart contrôle son agoraphobie légendaire en demeurant sous un néon. J’entre dans la salle. Jerry Hsu y joue l’élève jemenfoutiste en squattant au dernier rang, tandis que mes amis fayotent au premier. Je les rejoins et l’écran commence à grésiller. Accompagné d’un compte à rebours de deux minutes, le sigle Stay Gold apparaît progressivement. La foule hurle, siffle, tape des pieds, lance quelques private jokes sur les mères de certains et finit par applaudir.
La part de Kirchart fait office de prélude, sorte de rétrospective, d’adieu à la scène copieusement salué par l’assemblée.
Après la présentation de la team, place à Brandon Westgate. The Boss dit de lui « Brandon is the new thing… that’s the way people are supposed to skate ». Et en effet, il est à mes yeux le seul de la vidéo à avoir repoussé les limites du skateboard.
Pour ce qui est du style, c’est davantage Bryan Herman qui m’impressionne. La première partie de sa part est uniquement constituée de lignes en flat et par dessus des tables à pique-nique. Sept années de maturité l’ont bonifié comme un grand Bordeaux, bien que les goûts de l’animal penchent davantage pour la weed et les 40oz de malt liquor.
Spanky fait du skateboard à la mode sur des spots qui pourraient être anglais, alors qu’Aaron Suski ne donne pas spécialement envie d’acheter les produits de son sponsor, mais plutôt d’aller skater, ce qui est on ne peut plus sincère ! Grég soutient que Braydon Szafranski a la meilleure part. Je ne sais pas, j’aurais besoin de la revoir ; et puis il y avait Jerry Hsu qui se faisait mal, Jamie Tancowny qui gappait des trucs inouïs, Léo Romero qui remontait des handrails, the Boss qui redéfinissait son titre…
Le problème de chroniquer après un unique visionnage est que cela oblige à se fonder sur ses premières impressions. Lorsqu’on attend une vidéo comme le messie, on est souvent déçu par ses favoris dont on a traqué la moindre photo sur Internet ; on devient davantage réceptif aux autres qui ont dû mériter leur places, se dépasser. L’habillage est davantage celui d’une « This is Skateboarding 2 » qu’une réelle innovation. On retrouve ces accélérés automobiles et les surimpressions de portraits en poses lentes, à la différence près que les piliers de notre adolescence sont relégués au générique. Signe des temps ? J’ai davantage de plaisir en suivant la vie de tous ces types sur le net qu’en visionnant leur œuvre de ces dernières années.
Tout le monde traîne et discute à la sortie, remarquant à peine que Kirchart, Romero et Westgate sont assis par terre, contre le mur, les jambes étendues. Je manque de me prendre les pieds dans les santiags de Romero et le Foucauld de 15 ans refait surface. Je leur demande un autographe, comme pour m’excuser de ne rien avoir à leur dire, puis m’en vais, gêné. Pour Grég et moi, cette vidéo est celle du coup de vieux.
Plus tard, nous étions à l’after du Bottle Shop. « Je propose une minute de silence pour regarder Kirchart vivre » dit Grég, en renversant sa pinte. Mais l’agoraphobe n’a cure de notre idolâtrie et semble mettre de côté son handicap social pour se laisse draguer par une groupie. Nous quittons l’établissement au moment où un barman arrose Braydon Szafranski de mauvais mousseux. Dans l’axe de la salve, je suis trempé. Le tir a débordé sur le mauvais destinataire. Il est grand temps d’accomplir et de mériter.

Par Foucauld.

 

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