Cutler and Gross

Tuesday, May 4, 2010

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La première fois que j’ai entendu, ou plutôt lu le nom Cutler and Gross, c’était il y a quelques années dans une interview de Jarvis Cocker pour Rendez-Vous. On lui demandait d’où venaient ses lunettes et il avait parlé de ces deux patronymes évocateurs d’acétate de qualité. Je m’étais promis de m’y rendre un jour, et ce jour vint.

Débaroulant en skateboard sur Knightsbridge avec les gars de PMC, nous finîmes par trouver Knightsbridge Green, minuscule passage abritant le flagship de Cutler and Gross. Dérapage sur le tail. J’entre dans la boutique. Ce n’est pas très grand. À gauche les solaires, à droite les modèles de vue. Une jolie vendeuse un peu plump (mon adjectif anglais favori) est accaparée par une milf. J’essaie donc seul.

Il n’y a rien de pire que de changer de lunettes. Vous arrivez plein d’assurance, persuadé de trouver votre bonheur, de dénicher au premier coup d’œil les besicles qui vous rendront beau, de mettre la main sur la paire qu’on associera à votre personnalité à la manière d’un Woody Allen ou Terry Richardson, puis le concret vient chambouler vos projets. Vous ôtez votre ancienne paire, essayez un modèle dont le design vous séduit mais il se mue en immondice sur votre visage. Vous réitérez l’expérience. Ça ne va toujours pas. Vous remettez votre ancienne paire qui à son tour vous paraît hideuse. Vous commencez à suer, à devenir tout rouge. Le reflet du miroir vous montre ridé, chauve, dégouttant. Le moral est au plus bas. La confiance en soi ? Un lointain souvenir. Vous réessayez toutes les paires. Une fois, deux fois, trois fois. Vos amis en ont ras le bol. Ils décident d’attendre au pub d’en face. Vous les suppliez de n’en rien faire, de vous assister. Puissent leurs avis vous éclairer, mais ils diffèrent. Dans votre Barbour, c’est l’étuve.

Vous revenez dépité dans la boutique et piquez un fard devant les yeux bleus de la vendeuse. Elle vous observait du coin de l’œil depuis le temps que vous hésitiez. Son choix est arrêté depuis longtemps. Ce sont celles-ci qu’il vous faut. Non, non, certainement pas celles-là. Si, si, je vous assure, elles sont faites pour vous.

Coup d’œil vers la vitrine. Tirant sur leur quinzième mégot, vos amis montrent le pouce en signe d’approbation. Vous réessayez une dernière fois l’ancienne paire. Du passé faisons table rase, vous passez en caisse sans même jeter un œil au montant. La vendeuse vous tend l’écrin d’écaille. Vous la regardez dans les yeux et levez le poing en disant « P.A.S.S.I.O.N ». Vos amis vous immortalisent puis vous piquent le précieux paquet et jouent aux voleurs à la tire. Vous sautez sur votre skate et vous cruisez, cruisez, cruisez à leur poursuite, jusque St James’s street

Par Foucauld

(Photo : Terry Richardson et Mark Gonzales échangeant leurs lunettes)

twitter.com/douarde on 05/04/10

Tu avais eu le meme pb avec ta casquette. Au bout d’un moment, ça va rentrer.

twitter.com/douarde on 05/04/10

ah et mes anciennes adorables voisines de bureau rue JJ Rousseau distribuaient C&G en France, dommage qu’on ne se soit pas connu à ce moment-là

Foucauld on 05/04/10

Je vais finir par épouser une vendeuse anglaise, elles sont toujours de bon conseil.

Rodolphe Hirsch on 05/05/10

“plump”… miam.

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