Un monde sans figure
Sunday, November 18, 2012Rue Berger, une solide clocharde marche tête baissée, en cape de pluie. Elle tire avidement sur son clope, avant d’exhaler comme une Pacific 231. Ses bras vigoureux dépassent des non-manches du poncho et tiennent deux sacs en plastique recyclables. Je ne vois pas ses yeux.
Plus loin, un homme se tient face à la rambarde qui surplombe les escalators Pont-Neuf. Il est coiffé d’un chapeau ceint d’une bande léopard. Plume en main, il semble dessiner, mais rien ne bouge, comme s’il s’était endormi sur son croquis.
Plus loin encore, un autre homme est également sans figure. Coiffé d’une capuche, il enfouit son visage dans les flancs d’un chiot, tout étonné de surplomber un si gros corps.
Dans mon verre, le Hibiki affiche fièrement sa majorité internationale. C’est jeune pour un humain mais canonique en année chien.
Par Foucauld
« Mais si beaux que soient le jour, les arbres, l’herbe, la petite fille en rose, Peter ne voyait rien de tout cela. Il mettait ses lunettes si elle le lui demandait ; il regardait. C’était l’état du monde qui l’intéressait ; Wagner, la poésie de Pope, et sempiternellement la personnalité des gens et les défauts de son âme à elle. »
(Virginia Woolf, Mrs Dalloway)