Il est toujours facile pour les rachitiques précieux que nous sommes de s’encanailler à moindres frais. Il suffit de traîner sur le net, de dégotter un photographe qui a sué à notre place, de piquer ses photos en lui faisant un peu de pub et le tour est joué. La ligne éditoriale est cool sans que nous soyons mouillés par la fréquentation de personnages truculents dans quelques pubs sentant la bière aigre, les œufs durs et les pissotières flirtant avec les limites tolérées par les services d’hygiène. Je reconnais que c’est lâche mais nous n’avons jamais prétendu être braves. Puisqu’une faute avouée est à moitié pardonnée, je me permets de poster les photos de Luke Stephenson. Ses séries de joueurs de fléchettes et de participants aux championnats du monde de barbes et moustaches valent le coup d’œil. Promis, demain j’essayerai de me frotter à la vraie vie.
“L’ennui du dimanche est proportionnel à la qualité des deux jours qui l’ont précédé”. Ce n’est pas moi qui le dis mais ma petite nièce, Juliette, 6 ans. Et là, je m’ennuie ferme. Pour passer le temps, je réécoute les remixes de Ratatat. Les deux de Brooklyn font fondre leurs bruitages électroniques dans les plus grosses voix du hip-hop yankee. La tête bascule, les mains martèlent dans le vide : pas si terrible ce dimanche soir après tout.
Pour se donner bonne conscience, il est pratique d'avoir un prétexte pour picoler. Celui de samedi ? Le retour de la 2.50, la soirée de BH Magazine au Sans Souci, en partenariat avec SHKS. Le principe est le même que la première fois : 2,50€ la bière et Shino qui découvre à quoi servent des platines. Nous y serons !
Le Sans Souci 65, rue Pigalle 75009 Paris de 21h à 2h. Event Facebook ICI
Comme tout le monde, nous avons des projets. L'un d'entre eux : le lancement d'un magazine érotique. On vous tiendra au courant. Quoi qu'il en soit, certaines âmes bienveillantes nous refilent leurs filons, pour l'inspiration. Coco de Mer est de ceux-là. Oubliez Fifi, balancez Chantal aux orties, là on travaille le cuir sans trop se préoccuper de la dentelle. Plus qu'une simple boutique, Coco de Mer est un manifeste pour la libération des petites culottes, pour l'adoption massive du bondage comme exercice émancipateur. La clique ne s'arrête pas au corset de soir rehaussé de harnais en cuir. Elle nous offre des conférences sur le cunnilingus (60£), des plumeaux, des sets de tables, diverses potions magiques, un magnifique livre de coloriage, des godemichés de genoux, des épées de cuirs, le tout présenté dans un style boudoir plutôt réussi. La fête des mères approche, n'oubliez pas.
Puisque tout continue à dérailler et que même l'armagnac Saint Vivant n'y peut rien, j'ai été forcé de consulter pour la première fois en dix ans. Je me suis donc rendu chez un médecin dont j'ai déjà oublié le blaze et lui ai chanté ma petite histoire. Ce bon disciple d'Hypocrate a balayé mes inquiétudes cardiovasculaires et mes craintes héréditaires pour diagnostiquer un problème du muscle oculaire. Une cure de magnésium plus tard, il me flanque à la porte en bottant le train de mon hypocondrie. Rassuré mais toujours aveugle, je peine à retrouver mon chemin et révasse à l'idée qu'une jolie jeune femme s'appitoie sur mon sort et m'aide à rejoindre mon havre. Malheureusement, la rue Richard Lenoir reste désespérement vide alors je chante pour me donner du courage :
Take me down to the paradise city Where the grass is green And the girls are pretty Take me home (Oh, won't you please take me home)
Rien ne va plus. Je suis sujet à des vertiges bien réels qui n’ont rien à voir avec mon hypocondrie. Je vois flou, titube, me prends des portes dans le nez et des tabourets dans les gambettes. Pourtant je mène une vie équilibrée, n’ai rien bu depuis Chez Jules II, me lave les pieds à l’eau froide chaque matin et mange des lentilles. Du coup, je délire au lit et subis des réminiscences auditives. L’une d’elles est la version du « Love » de U2 par Johnny Cash. Voilà pour aujourd’hui.
Par Foucauld
(Photo : "Extase" by Ron Raffaelli and Nicole Avril)
Lorsque l’on souhaite profiter du beau temps sans négliger le boulot, il faut faire des concessions et c’est La Conjuration qui en pâtit. Je n’avais pas le courage de sacrifier mon plein de vitamine D sur le spot ensoleillé que sont les blocs d’Austerlitz au profit de l’engraissement du blog. Pour me rattraper, j’ai dégotté de quoi vous rassasier : un type a eu la riche idée de scanner tous ses sandwiches du déjeuner et de les poster sur son blog : Scanwiches. Quand on connaît la structure et la densité des sandwiches des lunches américains, on s’étonne que personne n’ait eu la même idée plus tôt. J’ignore si les compositions sont étudiées ou hasardeuses mais le résultat est aussi élégant qu’appétissant. Dommage que nos entrecôtes béarnaises et nos bavettes Rossini soient trop plates pour faire la même chose…
Il paraît que je n'écris pas autant que lui, que je me la coule douce. Message reçu. Mercredi soir, sous le patronage de Lucie et Simon (prononcez "Lucie and Simon"), je me perdais dans les allées d'Art Paris : il faisait chaud et l'open-bar s'avéra être un mirage. En revanche, d'un regard en coin, je fis la connaissance de Robert Longo. Américain, la cinquantaine, une précision de chirurgien. Il joue avec la photographie, la vidéo, les installations, mais s'il reste dans nos têtes, c'est pour ses gigantesques dessins au fusain. Deux mètres de moyenne pour un hyperréalisme dynamique. Il commente son siècle, ses bombes nucléaires, ses enfants pervertis par leurs jouets, son rythme de vie, ses fantasmes et ses névroses, mais aujourd'hui je vais réduire mon champs aux deux séries qui m'ont le plus marquées: Men In the Cities (1979) et Perfect Gods (2007). A elles deux: une petite trentaine de toiles qui donnent raison à Simon lorsqu'il me dit: "Ah ouais tu connais pas? Non mais ouais, lui c'est un gros".
Je reviens d'exil sans aucune actualité. Celui-ci avait des vues littéraires plus ou moins confirmées. L'inspiration était là, il est vrai stimulée par quelques prédécesseurs éclairés. Je me suis ainsi retrouvé à une soirée en l'honneur de Jacques Brel au Duplexe de Roubaix. Un premier film retraçait le parcours d'une classe de primaire ayant monté un spectacle en l'honneur de Brel. La star malgré elle ? Le gros Jojo, obèse roubaisien à la larme facile et la présence certaine. Après cette première projection, une retransmission du dernier concert de Jacques Brel à Roubaix le 16 mai 1967. Historique ! Filmé en plan serré, Jacques se donne comme à son habitude. La chanson "Le gaz" m'a particulièrement impressionnée. En voici la vidéo et ce splendide extrait :
Tu as des seins comme des soleils
Comme des fruits, comme des r'posoirs
Tu as des seins comme des miroirs
Comme des fruits, comme du miel
Tu les recouvres, tout devient noir
Tu les découvres et je deviens Pégase
Tu as des seins comme des trottoirs
Et moi et moi et moi
Je viens pour le gaz
En revenant, un aimable acolyte eut le bon goût de me refiler le numéro 567 de la NRF, celui qui contient l'essai de Thomas A. Ravier sur Booba : "Booba ou le démon des images" (En vente ICI). Il y mentionne Antonin Artaud, rappeur avant l'heure :
"Si j'enfonce un mot violent comme un clou je veux qu'il suppure dans la phrase comme un ecchymose à cent trous"
Elle était peintre, il était architecte, ils sont restés hollandais. Les œuvres de Schilte & Portielje (moi non plus je n'arrive pas à le dire correctement) naissent étrangement. Depuis des années ils agrègent différents fragments d'images dans une immense base de données. Quand l'envie le prend, un des deux pioche dans la jarre et commence à composer, rajoute, soustrait, peint, colle, retravaille. Harassé, il refile l'embryon à son alter ego, qui prend le relais. Ainsi, le couple ne travaille pas ensemble, ils jonglent. Le produit de ses innombrables aller-retours captive par cet étrange alliage de maîtrise technique et de naiveté floue et improbable; une galerie de personnages fantomatiques dont les morphologies défient les lois de l'anatomie. Le ménage refuse d'infliger aux spectateurs une rafale de textes pompeux qui imposeraient une grille de lecture étriquée, non, chacun y verra ce qu'il voudra. Merci à eux.
Mes mauvaises nuits sont jonchées de vidéos glanées à droite à gauche. Résumé: Kate Moross, tige colorée de 22 ans, talentueuse une fois sur trois (ratio strictement subjectif issu d'une visite méthodique de son site), britannique et assurément ce qu'ID appellerait une "it girl". Pas le genre de fille de la maison, mais son travail pour Simian Mobile Disco est proprement brillant. Épaulée de son comparse Alex Sushon, elle a réalisé une paire de vidéos pour le prochain album des deux James de Bristol. Ils plongent dans quelque chose que les montreurs de skateboards ont compris il y a bien longtemps: la musique se doit de rythmer le mouvement, et inversement. Leçon assimilée: à grands renforts de stromboscopes, la paire nous balance une vidéo géométrique, circulaire et subtile, où chaque bruit épouse une forme pour une fête dantesque. Pour le plaisir je lie une autre vidéo, toujours de SMD jouant 10000 Horses can't be wrong, mais un certain David Cohen aux lumières. Tournant au creux d'un écrin de néons, les deux magiciens du câble XLR s'agitent et, encore une fois on se croirait aux commandes du Faucon Millenium.
Il y a quelques années, la reine mère a parié que j’arrêterai le skate avant mes vingt ans. J’en ai vingt-deux. Elle a perdu. Nous nous sommes rendu au Paul Bert pour qu’elle paye son dû. Menu à 34 euros. Nous débutons par une salade de tête de seiche aux poivrons grillés. Les deux se marient à merveilles, tendres et fermes à la fois. Les poivrons apportent ce brin de sucré qui fait la différence. Je sauce jusqu’à la dernière goutte d’huile d’olive et me console avec un verre de Coteaux du Jura. Entre les plats, je regarde mon entourage. Des Anglais avertis, une famille tapageuse encadrant un fils gras et pétuneur de Marlboro Light (il le fait savoir) et des gens sans âges. Les messieurs portent la barbe mais pas à notre manière. Il ne s’agit pas de la barbe de jeune cul souhaitant arborer sa virilité balbutiante mais plutôt une barbe de seconde vague. Une barbe d’âge intermédiaire. Une barbe de nouvelle jeunesse ou de compensation de la calvitie. À gerber. Je préfère me concentrer sur ce qui arrive : des Saint-Jacques à la coque et un genre de petit plat en fonte. Je suis un peu déçu. Sous ce titre ronflant se cache en fait des Saint-Jacques cuites dans leurs coquilles et servies telles quelles. C’est simple et bon mais j’avais pris ce plat, séduit par son titre, en espérant entrer dans l’innovation. Tant pis. Les Saint-Jacques restent excellentes. Belles, grosses, fermes et parfumées, je m’en repais en raclant jusqu’aux filandres beurrées. Le plat en fonte contient de la purée de pomme de terre. Banal, tiédasse et un peu fade. Décevant. En revanche, les desserts sont une bonne surprise. Le Paul Bert considère à juste titre qu’ils doivent être autre choses qu’une bouchée sucrée permettant de finir sur une autre note que l’échalote ou le roquefort. Ils font parties intégrantes du repas. De vrais plats, larges et rassasiants. J’opte pour un baba au rhum façon savarin, large comme une roue de camion. On m’apporte une bouteille de rhum si la quantité d’alcool ne suffit pas. Ça ira. J’attaque. Pas mal du tout. Une crème chantilly subtilement parfumée et quelques pépites de fruits secs agrémentent le tout. C’est bon mais dans ce format cela devient vite monotone. J’échange avec ma voisine et hérite de son soufflet au chocolat et basilic. Aérien et fondant à la fois. Parfait. Je peux mourir heureux. Il faut que je retourne au Paul Bert, non pas pour dîner bien que celui-ci fut plaisant, mais pour déjeuner. En effet, ils ont un menu à 18€ entrée, plat, dessert qui change tous les jours et à l’air hallucinant au niveau gustatif comme au rapport qualité / prix. Je vous raconterai…
Par Foucauld
Le Bistrot Paul Bert 18, rue Paul-Bert 75011 PARIS Tel. 01 43 72 24 01 Metro Faidherbe – Chaligny
Ce que j’aime chez James Blagden ce n’est pas son histoire ou ses influences (Marvel Comics et compagnie, je m'en branle) mais un certain talent pour chroniquer visuellement notre époque. Des problèmes raciaux à la mode des grillz pour les filles, des réclames concrètes pour Nike aux amours, zoophilo-saphiques pour Spank Rock, il tappe toujours dans le mille. Son trait que je trouvais malsain au départ est en fait plein d'humour. Ses talents de dessinateurs sont indéniables (mirez la subtilité du visage du zombie d'en dessous) et les clients ne s'y trompent pas. Nike et Uniqlo pour les sapes, les prestigieux Interview et New York Times pour la presse ou encore Nylon pour un bonus branché, James Blagden pése et c'est mérité !
Nike SB vient de lancer sa troisième campagne de customisation. Le concept ? Demander à quelques élus de sa team de customiser un modèle phare de la game SB. A vrai dire, le résultat m'intéresse peu, il est même souvent vilain (drapeau rastafari, camouflage, détails compliqués…) et rappelle les tristes heures du streetwear à la française façon 2High ou Kaïra… En revanche, les campagnes prints sont prodigieuses d'ingéniosité. La dernière rend hommage à Mark Gonzales et ses cabrioles sur voiture. Darryl Angel, Clark Hassler, Justin Brock et Grant Taylor donne chacun leur intéprétation de l'exercice en rayant de leurs trucks les ailes de Cadillac ou van de tournée (et accessoirement customisent un modèle…). Dans les campagnes précédentes, Daniel Shimizu ou Paul Rodriguez rossaient des installations de néons et plexiglas. Superbes et innovantes, les Nike SB Custom Series sont l'exemple parfait d'un gros budget admirablement exploité. Les vidéos sont sur le site. Coup de coeur !