De mémoire j'ai commencé à m'intéresser à Beck lorsqu'une femme âgée m'avoua que je lui ressemblais vaguement, comprenez teint pâle et jolis traits noirs sous les yeux que nous avons bleus. Le génie en moins, sûrement. Comme l'écrit mon comparse les fin d'années nous accablent d'obligations diverses et, la fainéantise aidant, je ne m'étendrais pas sur l'amour que je porte à l'album The Information, dont les vidéos mal cadrées et sans grands intérêts améliorent nettement cette fin de dimanche difficile.
Pas particulièrement destiné aux directeurs artistiques, le label 4AD fait surtout office de couveuse pour les deux plus grands groupes de tous les temps, de ceux qui rhabille Johnny pour l'hiver. Celebration, trio inspiré rempli d'orgue et Tv On The radio, cinq hommes qui ont eu le droit d'être transformé en Légo. Tout ce petit monde travaille souvent ensemble et à eux huit ils renvoient tous les autres musiciens de la terre à leurs clarinettes. Mathématique.
Un dimanche en dents de scie, soleil, nuages et relents de samedi soir. Je retombe sur Lykke li, la suédoire a su faire parler d’elle depuis ‘little bit”. Bah, la notoriété ne lui enlève rien. J’examine ses dernières vidéos et m’attarde sur “I’m good I’m gone” : bouche béante et rétine engluée, un chef-d’œuvre d’images “à la nordique”, à savoir des couleurs grisâtres, des vieux et des lieux déserts. Comme je suis plutôt en forme je file faire un tour chez celui qui se cache derrière, Mattias Montero. Le coup de pied dans le nez, rien à jeter, une véritable ferme perlière. Morceaux choisis, qui ne vous empêchent pas de vous enfermer une petite heure sur son site, comme je le disais, superbe.
L'ennui quand on cherche à ne montrer que des choses belles, intéressantes, hors du commun et propres sur elles, c'est que l'on peut parfois se retrouver à sec, par manque de temps pour mener une investigation digne de ce nom. En guise d'excuse, je vous propose un pot-pourri de ce qui m'a plu ces deux derniers jours sans que je ne trouve le temps de vous écrire.
Chapitre 1 : God Help the Girl, le blondinet de Belle and Sebastian flanqué d'une nouvelle nymphette : prends ça dans les gencives Susan Boyle.
Chapitre 2 : Les bureaux de l'agence d'architecte Selgas Cano, où comment faire passer n'importe quel open-space pour une décharge napolitaine.
Chapitre 3 : Au fond de moi sommeille un être étrange capable, si je le laissais agir à sa guise, de passer une semaine enfermé dans une chambre devant une console, n'importe laquelle. De fait, je refuse l'achat d'une telle machine, qui réduirait ma vie, mes amours et mes projets à néant. Pour passer mes nerfs, je regarde le court métrage HALO (c'est bon, y'a pas qu' Ivan Chermayeff et le shoegaze dans la vie). De plus, ces quelques minutes d'animations de haute volée jouissent d'une certaine légitimité : elles sont le produit de l'imagination de Neil Blomkamp, faiseur de film de génie acoquiné aux pubars du monde entier et à l'origine du long métrage District 9, qui menace de sérieusement exciter notre été.
Maurizio Cattelan. Italien. La quarantaine tassée. Met en scène le suicide d'un écureuil, à l'échelle. Enferme ta grand mère dans le frigo. Jette des cailloux sur le pape. Met Hitler à genoux. Arnaud Lajeunie. Français. La vingtaine naissante. Pris à la gorge par le temps.
Puisque tout continue à dérailler et que même l'armagnac Saint Vivant n'y peut rien, j'ai été forcé de consulter pour la première fois en dix ans. Je me suis donc rendu chez un médecin dont j'ai déjà oublié le blaze et lui ai chanté ma petite histoire. Ce bon disciple d'Hypocrate a balayé mes inquiétudes cardiovasculaires et mes craintes héréditaires pour diagnostiquer un problème du muscle oculaire. Une cure de magnésium plus tard, il me flanque à la porte en bottant le train de mon hypocondrie. Rassuré mais toujours aveugle, je peine à retrouver mon chemin et révasse à l'idée qu'une jolie jeune femme s'appitoie sur mon sort et m'aide à rejoindre mon havre. Malheureusement, la rue Richard Lenoir reste désespérement vide alors je chante pour me donner du courage :
Take me down to the paradise city Where the grass is green And the girls are pretty Take me home (Oh, won't you please take me home)
Après mon article, Artus nous a invité à la projection du court-métrage qu’il a réalisé en l’honneur de sa mère : « Le dernier voyage de Maryse Lucas ». À l’Elysée Biarritz, ce cinéma du VIIIe arrondissement où est projeté le film, je suis assis à côté d’une autre mère, fictive cette fois-ci : celle de Romain Duris dans L’Auberge Espagnole/Les Poupées Russes. Le film commence. Artus et son pote David Ledoux partent de Paris. Le premier est en fixie, l’autre en Vélib. Ils roulent en riant, chapardent dans les étalages, crient leur joie de voyager et de s’embarquer dans une nouvelle aventure. « Gainsbourg et son Gainsborough vont rejoindre Paris. » Ici c’est plutôt « Artus et son urne vont quitter Paname ». En effet, le but de ce voyage est de ramener les cendres de Maryse Lucas sur sa terre natale afin de les disperser. C’est l’occasion pour Artus de retrouver ceux qui ont accompagné sa mère dans ses derniers instants.Voisine ou camarades de comptoir, Artus leur pose des questions sur sa mère, leurs impressions, ce qu’ils conserveront d’elle dans leurs mémoire. Il s’attend à des récits et des détails palpitants de la vie de cette hippie globe trotteuse mais se retrouve confronté au mutisme et aux répétitions. Les « proches » de Maryse n’ont gardé que l’image d’une alcoolique carburant à la Suze et exposant son corps usé et piercé au soleil, faisant fi de toute pudeur. Artus souffre de l’incompréhension de ces gens. David le raisonne. Il est normal que ces vieillards qui ne connaissent que le triangle qui va du comptoir du PMU à leur lit en passant par leurs champs ne puissent voir autre chose qu’une poivrote pittoresque chez cette femme. Au moment de la dispersion des cendres dans une rivière les « amis » de Maryse sont présents, en ligne sur un pont. Artus est en retrait. Il se recueille puis dessine un visage souriant sur l’urne, avant de disperser son contenu puis de la jeter dans un courant. Cet adieu symbolique semble l’apaiser. Il est artiste comme le fut sa mère. Son sang coule dans ses veines. Un sang différent de celui des autres. Un sang d’artiste. Un sang qui est le sel de la Terre.
En deux mots vite fait parce que là j'ai les macarons au four et les papillotes qui crament. Megaforce sont méga forts (noël, j'écris ce que je veux), les maîtres de l'effet spécial qui a l'air facile mais qui ne l'est pas (noël, j'écris ce que je veux). Après avoir fait voler les Naïve New Beaters, ils cognent sur Metronomy. Moi qui haïssais le Karaoké, j'ai revu ma copie. Mégaforts j'vous dis.
Question: Comment produire, en quelques minutes, un clip de "psychédélique / Rock / Electrique" et une série d'affiches correspondantes ?
Réponse: Roel Wouters nous prends par la main et nous montre : "tu prends deux coqs un tantinet excités, tu les barbouilles de deux couleurs, et tu fais en sorte qu'ils s'affrontent sur ladite affiche". Je réalise peu à peu à quel point la violence animale peut être esthétique.