Le centième kilomètre

Monday, July 18, 2011

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Alors que la France s’apprête à célébrer sa fête nationale, je descends du train qui m’a emmené de Saint Lazare à Mantes-la-Jolie. À mes côtés, Tigre de Papier. Il est huit heure et demie et nous nous demandons ce qui a bien pu nous pousser à nous retrouver ici, nauséeux d’avoir avalé des pâtes au réveil, « au fond des boues tenaces et des banlieues insoumises ». La bicyclette, pardi ! Notre objectif : ne faire qu’une bouchée des cent vingt-cinq kilomètres qui nous séparent de Socquentôt. Les montures paternelles tiendront-elles le coup ? Combien de fois faudra-t-il se ranger dans le fossé pour changer les boyaux du Roger Lapébie de mon compagnon de galère ?
Nous longeons la Seine et ses méandres, grimpons des départementales dans la forêt, croisons des kébabs de village et des panneaux publicitaires au chômage, suppliant les passants de bien vouloir les utiliser pour communiquer. Les avions de chasse rugissent au-dessus de nos casquettes Champion. Des retraités astiquent leurs médailles, coiffent leurs calots et grimpent dans leurs voiturettes électriques, direction la mairie ou le cimetière, vers le clairon et les honneurs. D’autres, plus anarchistes, se contentent de tirer sur le mégot, les mains dans les poches du bleu de travail. Rougeaud sous le couvre-chef, c’est l’imperturbable Français de l'imaginaire collectif. Des tronches à accueillir les alliés avec la rasade de calva clandestin et les réformes avec un bras d’honneur.
Rouen marque la première pause. Nous célébrons quatre-vingts bornes avec une bière. La carte est alléchante, nous y succombons, à mille lieues de toute raison nutritivo-cycliste. L’os à moelle se conjugue au pluriel, la côte de bœuf fait un kilo, le pichet de Côtes-du-Rhône est bon marché et salvateur. L’heure est à la béatitude. Double café sur une petite place, vadrouille digestive et touristique, bidons remplis, il faut partir. C’est le moment que choisit le dérailleur du Pétardier (surnom de R. Lapébie, ndlr) pour tomber en miette. Doté de quatre mains gauches et d’aucun outil, nous mettons une heure à le revisser. Il faut y aller. La suite marque l’apparition de la douleur. Le béton hasardeux d’une départementale longeant l’autoroute est dénué de toute poésie. Seul le centième kilomètre nous arrache des cris de joie. Nous sommes enfin des pédaleurs à trois chiffres.

Par Foucauld

(Photo : André Leducq et Nicolas Frantz)

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Retour à la jeunesse éternelle…

Monday, July 11, 2011

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Thrasher vient seulement de sortir les vidéos de ses trente ans à la Gaîté Lyrique, je suis donc excusé de ne publier ma chronique (condensée) que maintenant.
Début de soirée, les stars ont quitté la rampe, mais c’est le défilé : Andrew Reynolds, Tony Trujillo, Dustin Dollin, Kevin « Spanky » Long, Stefan Janoski, Grant Taylor, Wieger, Neckface, Beagle(onism), Atiba… Jake Phelps, le rédac chef, nous sort une poubelle remplie de bières fraîches et nous trinquons sous l’œil ombrageux du vigile.
Casquette Shake Junt vissée sur le crâne, je suis abordé en anglais par une femme d’une cinquantaine d’années qui me demande si elle peut me prendre en photo. Je pose et nous discutons. D’où vient-elle ? D’Arizona. Mais pourquoi ? Son fils est Shane Heyl de The Goat et, accessoirement, le créateur de mon couvre chef… C’est la première fois qu’il vient en Europe, ça promet !
En me dirigeant vers la salle de concert, je tombe sur Patrick O’Dell, mais n’ai pas la moindre idée de ce que j’ai pu lui raconter. Pourtant, j’en ai pissé des lignes sur son compte…
À l’intérieur, The Goat a commencé. Le pogo également. Collé à la scène, nous hurlons, tapons les enceintes, piquons les bières qu’abandonne le groupe. Luh Dat Shit !
Bad Shit, déchaînéS. Un « S » qui met le groupe et le public dans le même bain. Neckface pointe un aérosol vers la flamme d’un briquet et manque de brûler la batteuse qui explose une canette sur son instrument. Fin du set, tout le monde quitte la salle pour se rafraîchir avant Dinosaur Jr. Le vigile tourne le dos, Grég et moi escaladons la scène et filons en backstages. Nous buvons des bouchons de whisky avec Spanky, discutons avec Shane et Beagle, tandis qu’une groupie détourne Dollin et que Neckface hésité entre deux laiderons. The Boss est extra-terrestre. Il ne parle à personne et fait penser à ces gamins propulsés dans un monde de grands, qui n’y trouvent pas leur place et se raccrochent à la seule chose qu’ils comprennent : leur planche.
Une autre soirée nous éloigne de l’after. Triple shake (Junt) pour dire au revoir (deux fois avec le plat de la main et la troisième avec le poing fermé) et en avant les souvenirs !
Le lendemain, mon pote Elvis qualifiait la soirée de « retour à la jeunesse éternelle ». Je lui emprunte sa tirade et appuie sur « publier ».

Par Foucauld

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Public Domaine

Thursday, June 23, 2011

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« Tu es sûr que tu veux regarder ça ? Mais c’est un livre sur le skate. Non mais parce que moi je n’ai pas trop envie que tu regardes ça. »

Voici les propos tenus par une mère de famille, entendus derrière les rayonnages du centre de ressources de la Gaîté Lyrique. J’ignore si le bambin voulait ouvrir « The Golden Age of Neglect » où autre « Deformer »,  mais j'ai décidé de le venger en me plongeant dans Public Domaine, l’exposition de « skateboard culture », accompagné de Pedro Winter, Seb Carayol et Vincent Carry en guise de guides.
Après quelques vidéos dont l’une sur trente mètres de mur, une sélection de planches aux graphismes « scandaleux », parfois retirées du commerce, pointe du doigt les vices de notre société. Drogues, armes, politiciens foireux, racisme, tous les sujets ont été traités par des graphistes souvent devenus mythiques : la « Disposable Skateboard Bible » en vrai.
Plus loin, « French Fred » projette ses photos sur une installation de boards blanches, Neckface recouvre des mannequins d’injures françaises et Sénizergues fait saliver les grands et les moins grands avec sa maison skatable. Un étage plus haut, Thrasher met à l’honneur 30 ans de clichés d'anthologie et des écrans projettent les rétrospectives des meilleurs photographes du milieu. Dès qu’il évoque quelqu’un, Pedro parle de légende et s’en excuse : « En fait, j’ai l’impression qu’il n’y a que des légendes dans le skate ». Je repense alors aux propos du Boss (Andrew Reynolds, ndlr) qui parle ainsi de ses troupes, des kids déjà mythiques au début de leurs carrières. Steve Caballero vient nous dire bonjour et montre ce que donne l'une de ces fameuses légendes en chair et en os. Je ne résiste pas au plaisir de faire mon fan et réclame une photo en sa compagnie. Après le dessin de Neckface, et avec la soirée des 30 ans de Thrasher dans dix jours, l’été s’annonce mouvementé à la Gaîté… Mes murs vont se retrouver couverts de souvenirs !

Par Foucauld

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Neck Face

Wednesday, June 22, 2011

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Été 2008, je quitte New York pour la première fois, après avoir skaté des Brooklyn Banks à Tompkins Square, chuté dans les boues immondes de Chinatown, connu le fond du gouffre et les étoiles, bref, « l’incommunicable passé ». Chaussé de Vans customisées par Neck Face, je comptais les graffitis de ce dernier sur les murs de la ville et les chiottes des bouges. Je m’amusais de sa méchanceté, des lieux astucieux où il la déployait.
Été 2011, je sors de la démo Girl à la Gaité Lyrique. Sur des modules en forme de logo, Chris Haslam, Rick McCrank, Brian et Kenny Anderson nous ont éblouis. Dehors, Neck Face patiente sur un bout de trottoir. Je l’aborde et lui demande s’il peut dessiner sur mon carnet. Il s’exécute de ses doigts sales et je lui conte une anecdote : le lendemain de mon départ de New York, il a dormi dans le lit que je venais de quitter, trop bourré pour continuer à faire la fête avec Todd Jordan et Marty, mon colocataire. Clin d’œil de la vie, promesse de rencontre, l’avenir se dessinait et New York m’avait armé.

Par Foucauld

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Je skide avec les mots…

Monday, June 6, 2011

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Lille la nuit, ses larges avenues désertes. Foncer, foncer, foncer vers l’inconnu. Faire la fête jusqu’à sept heure, rentrer avec cette saloperie de jour qui recommence à venir trop tôt, retourner sa veste et le célébrer en montant sur le toit. De là, hisser les enceintes par la fenêtre puis laisser la Mafia K’1 Fry cracher : « Ceux qui auront compris que la vie et ce que t'en fait jusqu'à ta mort / La vie n'est pas un film dont ton quartier serait le décor ! ». Qu’y a t-il de mieux qu’un alley cat en dix checkpoints pour découvrir une ville, un nouveau décor ?
Mollets à l’air, casquette Shake Junt et tête dans le guidon pour la Café Racer, c’est le retour de bibi sur le semi-course paternel. « Vas-y Pantani ! » me crie un facétieux. « Le Pantani de la gueule de bois, ouai ! » aurait pu dire Grég de PMC, courageux compagnon de galère au milieu des Cinelli Mash. Ensemble, nous ne ramons pas mais pédalons sec. Étape par étape, à force de suivre ceux qui connaissent la ville, Aurélien, Gildas et moi finissons dans les dix premiers. Le gain ? Une série de tours de piste pour nous départager. Septième. Encore vert le vieux !
Fin des hostilités, retour à la fraternité. Nous roulons en peloton, acclamés par les clients des baraques à frites. Noki éclate son troisième pneu du week-end, le répare, puis direction Sequedin et L’Archelois, un sympathique établissement disposant d’un barbecue et d’une pompe à bière. Les vainqueurs sont célébrés et la ripaille commence. Le bar fait son chiffre pour les dix ans à venir, jusqu’à ce que l’orage éclate. Razzia sur les sacs-poubelles, la troupe parade en poncho de fortune et file en after chez Gloria.
Réchauffé au gin & tonic, un petit futé dégotte un vélo d’appartement. La musique est à fond, un batteur accompagne la sono. Trois personnes sont obligées de tenir la malheureuse bécane pendant qu’à tour de rôle nous pédalons à nous en faire éclater le palpitant. « Le gagnant se fait tatouer la date ! » dit l’un. « J’sais même pas quel jour on est. » lui répond un autre que l’excès de Goudale pourrait pousser à commettre l’irréparable.
En retrait, Noki philosophe. « Ça, c’est du temps gagné sur nos vies » me dit-il à quatre heure du matin. Il y a de ça. Foncer en parallèle de l’existence que la société nous pousse à mener et, une fois centenaire, regarder en arrière en citant Willa Carther : « Nous avons possédé ensemble le précieux, l’incommunicable passé. ». À notre échelle, peut-être est-ce simplement se coucher mélancolique après tant de P.A.S.S.I.O.N. Non, c’est idiot. Il faut plutôt écrire. De toute façon, on ne dort pas, on fait des siestes !

Par Foucauld

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Alleï Ket !

Friday, May 6, 2011

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Partir sur un coup de tête est une chose merveilleuse, surtout lorsqu'il s'agit d’aller vers l’inconnu. Le hasard des actualités Facebook a mis en avant que trois amis à pignons fixes comptaient se rendre à Bruxelles pour une alleycat. Une belle connerie à faire, surtout lorsqu’on ne connaît pas la ville… J'ai retapé et allégé le vieux Peugeot paternel, me suis joint à eux et nous avons rejoint la capitale Belge.
Bruxelles n'est que monts : avantageux en descente, parfois cauchemardesque en montée. Les pavés viennent pimenter l'ensemble et l'effort rend les jambes douloureuses. Les muscles sont prêts à éclater, une sensation bien différente de celles des sports que j'ai pu pratiquer.
Après une nuit et un après-midi de vadrouille, je craque et acquiers de la guidoline liège + gel de chez Cinelli. Ainsi équipé, je suis prêt pour la course.
Petit à petit, une foule bigarrée se rassemble devant Vainqueur, la boutique de vélo de la Place Flagey. Tous se saluent d'une bise unique. Typique. Peu de tatouages et de street wear, nous sommes loin de la panoplie du parfait petit coursier américain qu'affectent les parisiens. Bécanes sans prétention ou cadres uniques, les yeux inspectent les montures, comme lors d’une convention de tuning, ce qui a son charme.
Après inscription, les participants se voient remettre un numéro et une liste de checkpoints. La principale difficulté réside dans le fait que l’ordre des points de passage obligatoires est libre. Chacun doit penser son propre itinéraire, au risque d’en choisir un mauvais.
Pour commencer, la centaine de cyclistes est priée d'effectuer un petit exercice. En tournant dans le sens des aiguilles d'une montre, il faut rouler sans poser pied à terre, sous peine d'être éliminés du jeu. Les organisateurs resserrent le cercle et le nombre de participants diminue. Les trois survivants se voient offrir du temps additionnel pour le classement final.
Puis c’est le départ. Placés derrière une rangée de banc, au top nous courons vers nos montures. Sans connaissance de Bruxelles et sans ami néophyte, je n’ai d’autres choix que de suivre les miens qui filent à grands coups de cale-pieds. La cadence est rude, mais le premier des cinq checkpoints m’encourage à poursuivre. Nous sommes dans les temps et mon corps s’habitue à l’effort. Au second arrêt, il faut remplir son sac d’un maximum de boîtes à pizza. Plus on en livre au troisième checkpoint et plus l’on gagne de minutes. J’apprendrais plus tard qu’un petit futé a eu l’idée d’en enfiler une vingtaine sur une chambre à air portée en bandoulière. Je ne pouvais clairement pas rivaliser avec mes quatre petites boîtes tassées dans un mini sac Quechua… C’est d’ailleurs après livraison que mes ennuis commencent. Placé entre deux pelotons d’amis, je me laisse distancer par le premier et ne vois pas le suivant prendre une autre route. Me voilà seul, complètement paumé dans cette ville inconnue. Je tourne en rond, guette l’arrivée du moindre cycliste et finis par suivre un fixie qui n’a pas l’air content que je vienne perturber sa solitude. Je lui fais part de mon désarroi, mais ce dernier s’accroît lorsque je me rends compte que nous sommes de retour au checkpoint des pizzas. Forcé d’abdiquer, je demande penaud le chemin qui mène à la ligne d’arrivée.
Les vainqueurs sont déjà là, occupés à se réhydrater à la bière. Je les imite et nous patientions jusqu’à la soirée. Celle-ci s’ouvre avec le goldsprint : deux vélos côte à côté, la roue arrière reposant sur des rouleaux. Le rouge et le bleu doivent s’affronter dans une course de vitesse, le chemin parcouru s’affichant sur un panneau lumineux. Mon numéro est tiré au sort et je me fais battre à plate couture. Qu’à cela ne tienne, un poulicroc et une portion de frites me remettent d’aplomb. La nuit peut commencer…
Quelques jours après cette course, je ne sais départager ce qui appartient au monde du vélo, à Bruxelles ou à l’état d’esprit des organisateurs. En fouinant, je suis tombé sur plusieurs albums photos des participants de la course. Tout le monde sourit, respire la joie de vivre, simplement. À la soirée, j'ai été impressionné de voir que les gens demandaient au micro si certains n'avaient pas d'endroit où dormir et si d'autres pouvaient les héberger. Bel exemple d’entraide internationale.
C’était également la première fois que je découvrais une ville étrangère où l’on parle français. Comme lors d’une amitié fulgurante, on se demande comment on a fait pour vivre si longtemps sans se connaître. C’est certain, I will be back, fieu !

Par Foucauld

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Paie ton mariage…

Tuesday, April 12, 2011

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Le skateur pro Don "The Nuge" Nguyen s'est marié et ce n'était pas triste…
Les photos sont de Shad Lambert et la bière y faisait office de champagne.

Par Foucauld

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Hippie de merde

Friday, January 14, 2011

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Un gosse de quatre ans et demi qui nous parle de son expérience avec la weed, la police ou les speed freaks puis expose sa vision de l’avenir et ses rêves dans le San Francisco de 1970 qu’il parcoure pieds nus.

Par Foucauld (via)

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Markey Mark (the Gonz by Alex Olson)

Tuesday, December 21, 2010

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Après Peter Sutherland avec Dill la semaine dernière, c'est au tour d'Alex Olson de poster une série de portraits d'une autre légende : the Gonz… Appréciez-les en cliquant sur les images, ou directement sur Olson Stuff.

Par Foucauld

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L’éducation skateboardistique de mes parents

Monday, November 29, 2010

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Comme Edouard Baer « je suis un très mauvais citadin. Je ne fais jamais de sortie culturelle, je ne vais pas au cinéma, ni aux expos, ni au théâtre d’ailleurs ». C’est donc tout naturellement que j’ai raté l’exposition de Raphaël Zarka au Palais de Tokyo. Je n’ai pas lu sa « Chronologie lacunaire du skateboard » ou « La Conjonction interdite ». Je me rattrape comme je peux, en l’écoutant parler dans « Qui sera le maître ?», court-métrage fort attendu, sorti il y a une quinzaine de jours.
Dans ce film Zarka expose les rapports que la société entretient avec le skateboard, tandis que se croise une histoire d’amour en sursis, un chauffeur de taxi et un skateur en polo rouge. A voir.

Par Foucauld



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