« Toutefois mon oncle Benjamin n’était pas ce que vous appelez trivialement un ivrogne, gardez-vous de le croire. C’était un épicurien qui poussait la philosophie jusqu’à l’ivresse, et voilà tout. Il avait un estomac plein d’élévation et de noblesse. Il aimait le vin, non pour lui-même, mais pour cette folie de quelques heures qu’il procure, folie qui déraisonne chez l’homme d’esprit d’une manière si naïve, si piquante, si originale, qu’on voudrait toujours raisonner ainsi. (…) Mon oncle Benjamin avait des principes : il prétendait qu’un homme à jeun était un homme encore endormi ; que l’ivresse eût été un des plus grands bienfaits du Créateur, si elle n’eût fait mal à la tête, et que la seule chose qui donnât à l’homme de la supériorité sur la brute, c’était la faculté de s’enivrer. »
Claude Tillier : Mon Oncle Benjamin, (livre favori de Georges Brassens, ndlr)
Cloué à Paris, je vis le soleil par procuration, via l’Afrique du Sud. Mais un soleil noir comme disait l’autre, un truc sombre et collant, une plongée dans les livres de Roger Ballen et une balade avec Die Antwoord, à la recherche du Tokoloshe, un nain maléfique, polymorphe mais toujours velu, qui scelle les femmes par le viol et court tout nu dans les rues.
Il y a longtemps, un anonyme avait commenté la Conjuration en me conseillant vivement de laisser tomber les critiques gastronomiques au profit du skateboard. J’avais sagement suivi ses recommandations, mais aujourd’hui, je suis désemparé. En effet, que faire lorsque vous êtes invité au dîner d’Irène Erotic Fanzine ? Passer à la trappe le somptueux menu spécialement conçu pour l’occasion par un chef londonien ? Oublier les soupes froides de betterave au gingembre et à la cannelle ? Expédier aux oubliettes le magret de canard, son foie gras poêlé, sa purée à la vanille et sa sauce miel et cerises ? Quelle injustice ! Surtout que la soupe était accompagnée de pain d’épices et qu’une panacotta aux accords d’orange était servie en dessert… Déguster est une chose importante, mais nous étions conviés pour échanger. Il y avait là de hautes sphères graphiques, ces messieurs du Collectif 5.6, des demoiselles oeuvrant dans la lingerie, d’autres dans l’histoire de l’art et même une propriétaire de cocker non castré amateur de mort au rat. Un curieux mélange qui finit par communier à grand renfort de vin rouge. Les phantasmes de Reiser furent évoqués, tout comme les souvenirs d’enfance, les graffitis polissons, la paranoïa de certains modèles, les lapins posés au Champollion, les poèmes d’Henri Cantel, l’art de la feuille de rose… Rien n’est plus semblable à un cul qu’un autre cul. Mais comme dit Marielle : « Quelle génie il faut pour peindre ça ! ». À vous, blasés, retrouvez les joies des rayonnages interdits, des illustrés polissons mal cachés par votre père, « l’enfer » de sa bibliothèque. Isolez-vous, sentez-vous délicieusement coupables et feuilletez Irène. Le prochain numéro arrive bientôt et vos draps s’en souviendront
Gare de Montpellier Saint Roch, après un week-end en autarcie complète, rapide retour dans une société qui a continué à vivre, à faire la queue au kebab "only the best", à dépenser dans des tongs et des t-shirts bariolés. Sur le quai, les bidasses roulent la pelle du dimanche soir à leurs pichasses. Seront-elles sages jusqu'à vendredi prochain ?
New York sous la pluie prend immédiatement l’allure de "Irene", cette photo d’Alex Prager. Pourtant, c’est un peu de soleil californien que je venais chercher dans ce vernissage « Greater LA » d’un loft de Broadway. J’y arrivais tard, encore frigorifié par le ferry de Staten Island, ce rafiot pour fauchés. Un vilain Chardonnay ne parvenait pas à me réchauffer. Il était l'heure de fermer, je n’avais le temps que pour un tour rapide. M’en prendre plein les mirettes, vite noter ce que j’aimais et remettre à plus tard une enquête, le projet d’y retourner.
En lisant ce très vieil article du New York Times, j'ai découvert Broken Noses, un film de Bruce Weber sur le boxeur Andy Minsker et la salle où il entraine la jeunesse de Portland. Poétique, amusant, parfois émouvant, il ne me reste qu'à mettre la main sur le DVD et manger autre chose que des extraits YouTube.
Après Peter Sutherland avec Dill la semaine dernière, c'est au tour d'Alex Olson de poster une série de portraits d'une autre légende : the Gonz… Appréciez-les en cliquant sur les images, ou directement sur Olson Stuff.
Certains préfèrent les filles longilines à moitié nues, lui passe sa vie au milieu des poissons. Depuis une petite dizaine d'années, Corey Arnold s'engage sur différents navires de pêche pour raconter l'histoire de ceux qui vivent sur l'eau. Rien à voir avec un reportage Le Monde sur les pénibles conditions des marins pêcheurs, non, là on vit avec eux, et, plus important, on se marre avec eux. C'est ce mouvement constant entre le sourire et le "merde qu'est ce que je fous là" qui rend son travail fascinant. Qui, à part un Alaskien aurait l'idée de jouer à la Pinata en pleine mer de Béring ?
Sous le choc devant ces portraits de Jason Dill par Peter Sutherland postés sur Desillusion, j'ai enquêté et découvert qu'ils paraitront la semaine prochaine dans Monster Children, un magazine australien qui a l'air dingue. Je commande…
Dans les milieux créatifs et journalistiques d’où émerge l’Imparfaite, l’érotisme est monnaie courante. Des Tumblr polissons parcourus avec le premier café, aux blagues de cul transmises aux collègues par mails groupés, personne ne s’interroge sur l’interdit qui frappe ce genre de démarches dans un environnement plus conventionnel. Prenons l’exemple de La Conjuration. Lorsque je contemple le blog, je ne suis pas choqué par nos articles et n’ai pas l’impression de franchir un interdit en les accompagnant de photos de poitrines avenantes. Ce point de vue n’est pas celui de mes amis qui n’osent s’y rendre à la fac ou dans leurs cabinets d’avocat, de peur d’êtres catalogués obsédés sexuels et de compromettre leurs carrières. Que l’Imparfaite (ou La Conjuration) se parcoure dans l’intimité nous est délicieux, mais cela ne doit pas nuire à sa propagation. La revue n’est en rien vulgaire, pornographique ou potache. Elle existe pour une lecture approfondie. Les articles sont poussés et intelligents, les photos de très grande qualité et les nouvelles se lisent avec plaisir.
Pour ce troisième opus, l’Imparfaite s’est en partie affranchie de la rue Saint-Guillaume et entre dans la cour des grands. La revue érotique de Sciences Po reste concentrée sur son sujet, mais on n’y retrouve plus grand chose de l’école, si ce n’est une partie des collaborateurs. Il faut le dire : ce n’est pas un journal de lycée, dupliqué à la photocopieuse du secrétariat. C’est un bel objet, à parution semestrielle. Superbe maquette, bon papier, absence de réclame et de parasite, chaque élément est mis en valeur et mérite toute votre attention. De la simulation masculine à la dimension sexuelle chez Hitchcock, des orgasmes en RDA aux pratiques de la Fistinière, il y en a pour tous les goûts, en librairie ou en ligne, pour 13,50€. BONNE LECTURE !