Un samedi soir en province

Thursday, September 10, 2009

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Ce qui suit est un vieux reportage sur la France des mobylettes à roues pleines, des coïts sous édredons de duvet d’oie (qui cancane toujours dehors) et des morts du samedi soir, lorsque la CB faisait office de téléphone portable.
C’est l’époque des derniers bals itinérants et de leurs quarts d’heures américains, où les coups s’arrangeaient sur des slows dédicacés.
C’est une France qui se salue d’une quadruple bise les bras ballants et qui a peur d’un nouveau virus que les médias appellent sida. "C'est bien joli de dire partout à la télé : "faut en mettre, faut en mettre". Mais ici, des capotes, on n’en trouve pas ! »
"L'alcool et l'sida, v'la qu'est-ce qu'on est : on est garnis ! On a fait des gamins, c'est pour les envoyer au cimetière d'toute façon. Alors moi j'pense on reste couvert, on bois pas et on est heureux. »
"C'que les jeunes voient à la télévision y faut qu'ils le voient même à la campagne, c'est impératif ça. Qu'y soient dans un autre mond' le samedi soir. Qu'y soient ailleurs !"

Alors Gazoil et ses potes s'exécutent. En R5 customisée dans la grange, ils fusent vers cet autre monde, en écoutant « Eins, Zwei, Polizei » de Mo-Do, guidés par les lasers du « Vibration », le Macumba local. C'est là qu'ils oublient la ferme est ses soucis jusqu’à six heure du matin. "Ca m'est arrivé plusieurs fois d'rentrer ivre en voiture mais heureusement, comme j'dis souvent, la voiture connaît l'chemin" . Confiant, c'est ainsi que Gazoil ramène tout le monde en entonnant "51 je t'aimeuuuh", avec ou sans âme sœur à la place du mort.

Par Foucauld

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Mantes-la-Jolie

Sunday, May 24, 2009

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Certains sortent pour boire un verre, débiter des âneries entre acolytes ou épouser pour un soir une cible plus ou moins honorable. Rien de tout ça ne nous animait, il m’est donc impossible d’expliquer ce qui nous fit s’engouffrer à cinq dans une Golf Cabriolet (et décapotée) en direction de la campagne voisine de Mantes-la-Jolie. Tassés, nous prions Saint Christophe de nous préserver du fossé tout en imaginant ce qui nous attendait. « Mec, j’suis sûr que ce sera ambiance chicha ! » « Putain j’vois trop l’truc. Les mecs qui ont foutu leur copine en cloque mais qui ont décidé de sortir quand même. Roulage de pet’ dans un salon au sol carrelé et à une heure du mat’ retour en Seat. » « On va encore arriver comme des couilles dans le potage. J’sens qu’on va se faire péter la gueule ». Pour l’heure, le vent martyrise ce qui figurera ma calvitie d’ici peu tandis qu’une enseigne Matmut clignote de verdure au milieu du néant. Au bout d’une heure, nous sommes perdus. Seules âmes sur une place de village, un panonceau nous indique que nous sommes à Vert. Vert ? Vert où ? Vert nulle part ? Une voiture arrive, nous la suivons et nous retrouvons dans une ruelle où sont parquées ses semblables. La réalité est allée encore plus loin que nos imaginations. Des types rodent en hoodies Children Of Bodom. Les treillis sont à la mode par ici, les clous sur les visières aussi. Nous pénétrons dans une maison où l’excès de tissu est certain. Quand Paris étouffe ses pores en jeans slims, nos nouveaux compagnons de soirée ont l’intelligence de les laisser respirer en sarouels. Je vois biens quelques chemises à carreaux mais l’important n’est pas dans le quadrillage. Ces messieurs font abstraction du carreau au profit du support. Une chemise est décrétée chic, son motif est accessoire. Les dreadlocks sont à l’honneur. De tailles et de mises variables, certaines sont ficelées, d’autres laissées libres. Il en existe même des solitaires que l’on laisse courir le long de l’échine alors que le reste du chef est rasé. Les propriétaires des lieux exposent. Récupérations peinturlurées, illustrations douteuses, les invités leur préfèrent le jardin. Je vois même un type embrasser les plantes. Déboussolés, nous stagnons mutiques autour d’une table. Nous n’avons qu’un rythme, celui de nos bras qui hissent à nos lèvres le liquide grossièrement distillé par William Lawson. Une jolie métisse me fait regretter le Nord qui coule dans mes veines, surtout quand elle est assaillie par une bande de saltimbanques saboulés korrigans. Le crincrin grince, les manches des guitares sont en érection, l’ensemble sonne manouche. La belle sourit et c’est le violon qui l’emporte. Les autres trompent leur déception en masturbant leurs instruments. La farandole est en marche. Jouvenceaux et jouvencelles pleurent en chanson. Quand Paris agite les bras en rythme, ici ce sont les jambes qui se lèvent pour danser. Les plus timides grimpent aux arbres pour voir sans être vu. Je m’écarte pour éviter une Birkenstock qui tombe du faîte. Saint Christophe veille sur nous, il enjoint notre chauffeur de ne pas boire pour éviter les tête-à-queue. Du coup ce dernier s’ennuie et veut rentrer. Back to the décapo. Nous flirtons avec le blasphème en entonnant des chants pieux entrecoupés de rasades de whisky. Nous ne sommes pas beaux à voir mais les âmes restent belles, le Petit Jésus saura faire la part des choses. Ainsi fut-il de Mantes-la-Jojo !

Par Foucauld



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Vernissage The Selby chez Colette

Thursday, April 2, 2009

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Une fois n’est pas coutume, ce fut un mercredi connecté. Convié au vernissage de The Selby chez Colette, me voilà au lieu dit, un mojito à la main. Au détour d’un rayonnage, je croise Frédéric Beigbeder. Un genre d’écran s’installe entre nous. L’œil vitreux, nous sentons quelque chose de louche. « Toi mon bougre tu as une sale trogne… » « Quel vilain menton… Il me rappelle étrangement quelque chose…. ». Nous nous dépassons, l’écran disparaît et son grésillement laisse place au bruit de sucions de nos pailles respectives qui raclent le font de leurs verres. En Narcisse, Thomas Lélu contemple son portrait par The Selby, Oliver Zahm claque des bises à des barbus en prenant des photos pour le Purple Diary, Pedro Winter arbore un logo Powell Peralta tatoué sur le biceps et Todd Selby dédicace son livre à côté de Mark « Cobra Snake » Hunter qui paraphe ses portraits de « charme ». Il cible ma bobine, grimace lorsque j’épelle mon blaze et cerne le personnage d’une phrase. Le résultat est scanné ci-dessus. Une minette vient saluer André. Sublime cliché mondain : « Comment vas-tu ma belle ? On s’est manqué à New York et on se manque à Paris… », le tout en lui caressant le bras. Un caricaturiste ne ferait pas mieux. Je fous le camp au resto, en compagnie de Tigres de Papier. Trois bouteilles de Lambrosco plus tard, me voilà embarqué au Baron. Des filles perchées sur des plateform shoes où s’affrontent zèbres et léopard dansent avec des tatoués en Nike SB. Les Winter enchaînent les titres aux platines puis font l’erreur de les passer au couple Cobra Snake/Selby. Ces derniers découvrent leur fonctionnement. Les coupures sont brutes, les enchaînements violents. Mac Lesggy est déchaîné sur « Bamboleo » des Gipsy King. Je n’ai jamais regardé cet olibrius à la télévision, mais ce n’est pas le cas de mes amis, choqués de découvrir qu’il a une vie sociale et festive à côté de la science pour tous… Les deux DJ devenant de plus en plus chaotiques, j’en viens à me dire que comparé à eux, Shino est Grandmaster Flash. Sur ces belles paroles, au lit !

Par Foucauld

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2.50 Volume 2

Friday, March 27, 2009

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Pour se donner bonne conscience, il est pratique d'avoir un prétexte pour picoler. Celui de samedi ? Le retour de la 2.50, la soirée de BH Magazine au Sans Souci, en partenariat avec SHKS. Le principe est le même que la première fois : 2,50€ la bière et Shino qui découvre à quoi servent des platines. Nous y serons !

Le Sans Souci
65, rue Pigalle
75009 Paris
de 21h à 2h.
Event Facebook ICI

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Des Hautes Etudes Commerciales

Monday, February 9, 2009

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Samedi, le Grand Quentin et moi devions témoigner de notre amitié à Arnaud et Simon qui mixaient au Gala d'HEC. Endimanchés comme des cousins de province (cravate en tricot lie de vin et costume de velours élimé) nous y allions avec des pieds de plombs, juste pour soutenir les potes. Grand bien nous a pris ! Au premier coup d'oeil, cela ressemble à un rallye en plus âgé. Les filles sont en robes de soirées, les messieurs sont cravatés de rouge ou en smoking. Cheveux longs et barbes de trois jours, blondinet rejeton d'ambassadeur, libanais, chinois, fils à papa, catho de service, chauves plus que précoces, futurs ministres… : le foyer de l'élite commerciale est une cour des miracles dont j'envie peu la fréquentation mais il a le mérite d’être amusant pour un soir. À chaque détour de couloir, derrière chaque porte ou dissimulé derrière quelques boiseries, c'est l'hallucination. Bien que nous sommes à Paris, c'est mieux que Disneyland : c'est Disneyworld ! Tout condensé ! Le grand barouf ! Des attractions humaines pour lesquelles il n'y a même pas besoin de faire la queue ! Sous couvert de gestes amoureux, mademoiselle vérifie l'étoffe de la chemise de son époux d'un soir. La popeline est-elle souple et douce ? Rugueuse et boulochée ? Est-il un bon parti ? King Size ou sommier qui grince ? Monsieur est plus simple. Il vérifie le physique, pas l'étoffe. En revanche, il agit en pleine lumière. Il montre à ses potes, fait profiter, soumet sa proie à leurs jugements alcoolisés. Nous dansons. Lapdance, booty, déchaînés les cocos !
À 3h58 heures du matin, un vigile indique aux disc-jockeys qu'ils n'ont plus que 4 minutes de set. Vite, je me rue sur le bar pour buter mon dernier ticket-conso. Refus catégorique :
- "Désolé monsieur, je n'ai plus le droit de servir d'alcool depuis une demi-heure. Il me reste du Perrier si vous voulez."
- "Pouah ! Peste soit des lois, je préfère laisser ma langue se réduire en poussière plutôt que de boire cette ignominie !"
Le Grand m'appuie. D'une glissade sur le parquet, nous sommes dans une autre pièce, face à un autre bar. La serveuse est tellement bourrée qu'elle en a oublié le règlement. Hosanna !
- "En revanche, il ne reste plus de whisky."
- "Alors quoi ?"
- "Et bien j'ai de l'absinthe…"
- "Allons-y, je ne veux pas me coucher idiot."
- "30° ou 70° ?"
- "Boaf, allons y pour le 70°, je confondrais le salon marqueté avec l'Assommoir ! Et ça se coupe avec quoi ?"
- "Le Coca c'est ce qu'il y a de mieux, vous pouvez m'croire."
Allons-y bibiche, moit'-moit' direct droite ! Me voila avec un verre à moutarde d'absinthe. Première gorgée. ça se boit, deuxième, troisième… Le cerveau est touché. Mon débit verbal s'accentue d'un coup. C'est fou ce que je raconte. j'invente, encense, critique, commente. Mes amis hallucinent, me prient de me taire, ont peur des réactions, pensent qu'on nous en veux. Rien n'y fait ! Je continue à créer dans le vent. J'aurais du noter mais j'étais trop occupé à parler, ça bouffait toutes mon energie. N'empêche, tu m'étonnes qu'avec l'absinthe Zola te pondait les Rougon-Macquart ! Easy le pissage de copie ! Les doigts dans le nez la postérité littéraire !
Foutus à la porte pour cause de fermeture, j'embarque mon verres avec moi, fait des paris stupide dont je ne connais plus la teneur, gagne ainsi "plusieurs centaines d'euros" dont je doute de voir la couleur un jour. Après un after embrumé, je choppe un Vélib back to the hood. Le problème ? Plus de place nulle part. Peu importe, je cruise et vérifie mes terres du 75011. Après une demi heure, je trouve enfin un emplacement. Je freine avec les pieds. Les fers de mes boots font des étincelles. Le 75011 a de la chance d’avoir un gardien comme moi !

Par Foucauld

(Photo : Michele Abeles)

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Chez Jules

Sunday, December 14, 2008

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Après plusieurs posts d'informations, j'écris celui-ci pour le plaisir et par nécessité. Vous n'y apprendrez rien d'édifiant mais les belles histoires fonctionnent à tout âge. Celle-ci est courte car je peine à me souvenir de tout. Peu importe son incohérence, l’hommage est rendu.
Hier soir, un garçon prénommé Jules recevait en sa demeure. Je tairais son nom par égard pour sa vie privée. Apprenez cependant que son patronyme accolé à son prénom offre une consonance des plus agréables et une majesté, digne de renommer un boulevard ou un lycée public.
Le dit Jules vit seul dans ce qui fut la bibliothèque marxiste du XIIIe arrondissement. 150 m 2 dépouillés de leurs livres et donc de leur âme. Il fallait bien leur en recréer une. Ce furent les notres qui y travaillèrent. Entassés sur trois niveaux, nous évoluions au gré de nos aspirations musicales ou des fluctuations des cours du whisky. Le rez-de-chaussée était sous l’égide d’Herenstein qui faisait crier les filles avec l’aide de la Compagnie Créole. Le premier étage tremblait sous les assauts d’Arnaud et Simon en double DJ set. Le second étage et sa terrasse étaient réservés à des échanges en principe plus calme. En homme prévenant, Jules avait plastifié sa literie afin d’éviter les planisphères. Ces précautions ne servirent pas à grand-chose, les couples pressés préféraient s’accoupler ailleurs. Ce fut le cas avec un brave type qui entreprît de butiner bobonne contre le mur de la terrasse. Je crois qu’elle n’a pas tellement apprécié le passage de la théorie à la pratique du « fistfucking ». Ce sont ses « fists » qu’elle se mit à utiliser, mais pour taper cette fois-ci. Les acolytes de son partenaire rappliquèrent et nous filâmes en bas, dans un environnement plus sain. Un tunisien binoclard venait de s’incruster et passait le live de Khaled au Pyramides du Caire. Ce fut ensuite Faudel et Quentin nous fit taper dans nos mains en hurlant des youyous :

Ro'ya maah chafouni nebghiha
ndirha raï, wah
ro'ya maah, nass gharou menna
idirou kifna wah, wah
wa ah, ah, ah laïli wah

Une soirée bien orchestrée peut vous emmener loin. Alors que nous errions sur les hauteurs du Mont Atlas par la pensée et les chansons, le bel A.L.I, au lieu de rentrer se coucher dans son lit à Belleville, s’est retrouvé perdu à Trappes. Ses trois lettres et lui-même firent trempette dans une piscine avant de manger une pizza au chèvre, copieusement arrosé d’huile. Vie, mort et résurrection de l’Eristoff Black.

Par Foucauld
(Photo : Hedi Slimane)

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