Johnny Hallyday, c’était un vendredi 29 Mai au Stade de France…
Monday, June 1, 2009Jamais je n’ai eu autant de mal à écrire une chronique. Comment traduire l’intraduisible ? Retranscrire quelque chose d’aussi personnel et en même temps d’aussi universel que Johnny Hallyday ? En ce vendredi 29 Mai 2009, après 17 mois, 25 jours et 8 heures d’attente, je franchis les tourniquets de la gare RER et parcours les allées qui mènent au Stade de France dans les odeurs de saucisses et les ondes positives libérées par tant d’inconditionnels. Je n’ai jamais attendu quelque chose avec autant de ferveur que ce concert. Que dis-je, je n’ai jamais attendu aussi longtemps de ma vie.
Ma passion pour Johnny Hallyday a connu bien des tourments. Amusement, railleries, incompréhension, mépris, ralliements, abandons, tels furent les sentiments de mon entourage vis à vis de cet investissement. Il y a bien cet aspect honteusement bourgeois qui conduit le binoclard précieux que je suis à se passionner avec excès pour ce genre de sujet, de personnage, et surtout de fans. Le gamin élevé aux cantates de Bach qui s’offre un voyage au Disneyland de la beauferie pour bouffer du loup tatoué et du mulet ? Il pourrait y avoir de ça si cette aventure ne durait pas depuis si longtemps. On ne trompe pas son monde indéfiniment lorsque le cœur ne suit pas. Le mien vibre en écoutant « Je la croise tous les matins », trésaille d’allégresse en chantant « Pour moi la vie va commencer », s’émeut en entendant « Que restera-il » et conduit mon être à afficher ses couleurs en acquérant un t-shirt flanqué du portrait de l’idole et du logo Tour 66.
En montant sur scène, Johnny Hallyday célèbre un retour aux sources, celui des vraies valeurs, dont l’amitié est un pilier. Il rassemble 80000 fans. Divisez ce chiffre par 10000 et vous aurez mon groupe. 8 gaillards de toutes races et tous gabarits qui attendaient ce jour coudes serrés et voix à l’unisson. Mes amis m’étonnent souvent mais cet unité décroche le pompon. Une unité faite de personnalités. Des personnalités touchantes dans la sincérité de leurs expressions, comme ce fut le cas avec le représentant sénégalais du groupe. « Je sais que ça va être le plus beau jour de ma vie. Je commence à comprendre pourquoi je suis sur Terre, pourquoi ma mère a quitté Gorée pour la France. »
Passé la découverte du Stade veillé par un immense aigle de métal, l’horreur de la première partie nous fait choir de notre nuage. Il s’agit de Christophe Maé. Nous l’imaginions en purgatoire du paradis Hallyday mais c’est trop d’honneur que de lui accorder ce comparatif. Maé est anecdotique, perdu parmi la masse des Christophe.
Il faut dire qu’une astuce géniale aide à faire tomber ce genre de sentence. Un compagnon fit acquisition préalable d’un sac à dos doté d’une outre reliée à un tuyau et communiquant par les bretelles. L’artifice permet au sportif de boire aisément pendant l’effort. Rempli d’un mélange J&B/Grant’s, il allège le fardeau Maé et nous redonne le sourire jusqu’à l’arrivé de l’idole.
Fanatiques, nous restons malheureusement étudiants. Nos finances surtout. Condamné à la pelouse ordinaire, notre entourage est tiédasse. Il est spectateur et non pas acteur. Nous n’en avons cure et la mollesse ambiante ne refroidit pas nos ardeurs. À l’unisson ! Toujours à l’unisson ! Nos cordes vocales sont à leur maximum, les poings sont levés, serrés à en éclater nos veines, en direction de la scène comme pour insuffler un maximum d’énergie à l’idole. Mais Johnny n’en a pas besoin. La voix est au top, l’enchaînement des chansons parfait. Bardé de tube dont l’intensité varie, il nous permet d’osciller entre écoute attentive et déploiement de force. Débarqué avec « Ma gueule », Johnny nous délaisse un peu plus tard pour se changer et débouler en Allumant le Feu. « Diego » est merveilleusement interprété. Fidèle à ce que disait son ami Michel Berger, Johnny transcende cette chanson. « Le Pénitencier » est étonnant. Lumière d’un bleu glacial, projecteurs braqués vers le ciel, les faisceaux figurent les barreaux. Nous sommes enfermés alors nous hurlons avec Johnny « C’est la nuit qu’on peut crier ».
Bien que nous nous en doutions, « L’Envie » pousse le concert à son paroxysme. Nous déployons tant d’énergie que la fin du premier refrain failli nous faire vaciller par manque d’oxygène. Mais l’envie est plus forte, d’autant plus qu’elle est celle du groupe. Les premiers se retournent vers les suivants. Nous formons un cercle puis un genre de mêlée. La tête renversée, nous regardons le ciel. Nous avons connu la faim, la soif et Johnny nous offre un festin. Reconnaissance éternelle.
Pour son rappel, l’idole chante son dernier tube « ça ne finira jamais ». Tout y est tellement évident que je n’ai pas besoin de disserter. Tout y est tout court.
Je ne suis que la somme
Des mains qui se tendent
Des coeurs qui attendent
Je suis ceux qui m'ont aimé
Le reste de la soirée ne se raconte pas et il est 8 h du matin lorsque que je quitte à regret les délices de Capoue pour ne pas rater la messe. Je contemple ma mine blafarde renvoyée par les vitres crasseuses de la ligne 4. Soudain, je comprends la noirceur de mes cernes : mes pupilles brûlent. Le feu est allumé. C’est certain, « Pour moi la vie va commencer »…
Par Foucauld
Foucauld, à chacune de tes lubies j’ai envie de te suivre. Après le cigare, les boutons de manchettes et les chemises, cet article m’a presque donné envie d’être avec vous.
Tu as une faculté incroyable à passionner les gens et je ne te l’ai jamais dit, mais je pense que c’est un don. Après cette « déclaration » me vient une pointe de jalousie de ne pas avoir ce même cadeau de Dieu. Mais je tenais quand même à vous dire mon cher Foucauld : Vous irez loin mon p’tit!
La classe, vraiment!
j’ai une théorie sur Johnny : C’est l’incarnation du héros à la française, flamboyant mais maladroit, charismatique mais bégayant, français mais belge, un paradoxe incarné. Je ne connais pas d’équivalent ailleurs dans le monde. En Allemagne ils ont Herbert Grönemeyer, mais beaucoup plus propret.
j’adore, bravo
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